Source : Noticias Prodigy MSN via MXporFC (version originale en Espagnol)
Le 23 juin 2015 (publication originale le 19 mars 2014)
Traduction : Sonia Béroud pour ACDV
Les Vallarta et les montages de Calderon
« Tous mes proches qui ont été emprisonnés ont été torturés, et le test effectué selon le protocole d’Istanbul s’est révélé positif pour chacun d’entre eux. », dit Guadalupe Vallarta. Elle maintient que sa famille a été victime d’un grand montage médiatique et politique.
Les personnes qui ont été victimes de coups montés judiciaires, politiques et médiatiques durant le mandat présidentiel du Président Felipe Calderón et de son Ministre de la Sécurité Publique, Genaro García Luna, sont sorties de prison les unes après les autres. Les prisonniers n’ont pas eu droit à un procès en bonne et due forme, et on leur a refusé leur droit fondamental à la présomption d’innocence. Parmi les personnes injustement incarcérées, on compte des journalistes, des membres de la hiérarchie militaire et policière, ainsi que des douzaines de maires de l’opposition, et enfin des citoyens lambda. L’affaire la plus médiatisée est probablement celle de la Française Florence Cassez et de son petit ami de l’époque, le Mexicain Israel Vallarta.
Les autorités et la chaîne de télévision Televisa fabriquent des coupables
Accusés d’être des kidnappeurs, Israel Vallarta et Florence Cassez ont été arrêtés le 8 décembre 2015. Le 9 décembre de la même année, un jour après leur arrestation, la police a préparé dans la propriété des Vallarta, le ranch Las Chinitas, la scène qui ferait l’objet d’un grand spectacle.
Dans la nuit du 8 au 9 décembre, Israel a été torturé. Florence Cassez et lui ont été emmenés par la police au ranch Las Chinitas, où la Police Fédérale des Enquêtes (AFI) avait tout préparé pour simuler en direct à la télévision la libération de 3 victimes d’enlèvement.
Lorsqu’il est devenu évident que l’émission de télévision diffusée en direct n’était pas une retranscription de la capture des membres du Zodiaque pris en flagrant délit, García Luna a dû admettre que les arrestations avaient été effectuées un jour auparavant, et qu’ « à la demande de la presse », ils avaient rejoué la scène. Mais ils ont également mis en scène des choses qui ne s’étaient jamais produites.
Ce que García Luna n’a jamais dit, c’est que Le Zodiaque n’a jamais existé, qu’Israel Vallarta et Florence Cassez ne sont pas des kidnappeurs, et que les victimes présumées ont été amenées par la police elle-même. Et que les chaînes de télévision se sont ridiculisées.
Censure et répression
On a interdit à Israel Vallarta de parler à la presse. Un jour, il a pu communiquer par téléphone pendant 10 minutes avec 2 journalistes français et, en guise de représailles, il a été placé en isolation complète pendant des mois. C’est pour cette raison que sa famille a peur d’être en communication avec la presse.
Guadalupe Vallarta, la sœur d’Israel, a accepté de parler avec RNW, et a expliqué que pendant que le montage des vidéos pour les chaînes de télévision Televisa et TV Azteca, on pouvait voir, sur certaines prises, Cardenas Palomino, un ami et subordonné de García Luna, saisissant Israel Vallarta par le cou de toutes ses forces, et lui enfonçant un doigt dans la jugulaire, de façon à lui faire mal pour le forcer à avouer sa culpabilité. Trois anciens employés de Televisa qui avaient été témoins du coup monté ont eu le courage de le dénoncer.
Le dossier que personne ne veut lire
Dans le dossier et les auditions, les contradictions ont commencé à émerger, en particulier dans les déclarations des victimes présumées, qui modifiaient souvent leur version des faits. Les versions ne coïncident pas du tout, de même que le moment ou le lieu des évènements ; rien ne correspond ou n’a de sens.
Alors que les correspondantes françaises à Mexico, Anne Vigna, Leonore Mahieu, Delphine Rigaud et Emmanuelle Steels ont trouvé des incohérences dans la procédure, et que le gouvernement français s’est intéressé à l’affaire, l’acharnement des médias contre Florence Cassez et Israel Vallarta s’est intensifié ; la police a distribué des communiqués de presse contenant de fausses déclarations et de fausses preuves.
Florence Cassez a décidé de s’occuper elle-même de son affaire. La stratégie de ses avocats consistait à obtenir un jugement le plus rapidement possible, pour ensuite faire appel et présenter son dossier devant toutes les juridictions possibles, pour amener son affaire jusqu’à la Cour Suprême du Mexique. Florence a été condamnée à 96 années de prison devant un tribunal de première instance, mais en appel, sa peine a été réduite à 60 ans, puis la Cour Suprême a déclaré que la procédure judiciaire n’avait pas été suivie en bonne et due forme, et elle a été libérée. Elle n’a jamais été déclarée ni coupable, ni innocente.
Deux frères et trois neveux d’Israel Vallarta sont actuellement emprisonnés et victimes de fausses déclarations, faux témoignages, et fausses preuves, diffamés par des communiqués de presse pleins de mensonges.
Dans une interview avec RNW, Guadalupe Vallarta a dit que le procès de son frère se déroulait très lentement, parce que pendant plusieurs années, la juge Olga Sánchez Contreras a rejeté les preuves de la défense. Les témoins n’étaient entendus que pour accuser Israel et Florence, et lorsque la défense demandait à les interroger à son tour, ils disparaissaient. Elle a également affirmé qu’ils essayaient d’alourdir le procès en inventant des infractions que ses proches n’avaient pas commises. « Mon frère Mario est devenu sourd après avoir été battu ; ils ont cassé son tympan. », raconte Guadalupe.
Depuis 2009, Mme Vallarta s’est consacrée à la défense de ses proches. Elle s’est rendue à toutes les auditions, et elle a fait remarquer quelque chose de très étrange : « Cardenas Palomino était toujours présent durant toutes les arrestations, auditions et rencontres ; c’est lui qui annonçait toujours les nouvelles aux média. Il faisait toujours appel au même groupe réduit de juges, de départements gouvernementaux et d’officiels. Parfois, ils changeaient de statut, mais leurs signatures figuraient toujours dans les documents. A chaque fois qu’ils capturaient des kidnappeurs, ils disaient qu’ils faisaient partie du groupe « Le Zodiaque ». Ils les torturaient pour pouvoir ensuite accuser les Vallartas. Israel a des preuves de son innocence, et il veut non seulement être libéré, mais également être acquitté, pour que justice soit faite. », insiste notre interviewée.
La presse et la rigueur journalistique
Emmanuelle Steels, la correspondante du journal Libération à Mexico, a étudié l’affaire Vallarta-Cassez depuis 2009, et elle a dit à RNW qu’il s’agissait d’un coup monté politique, judiciaire et médiatique, et qu’à chaque fois qu’une incohérence, une contradiction, une résolution, était sur le point de faire surface, ou lorsque le Président Français de l’époque Nicolas Sarkozy était sur le point de rendre visite à Florence, un membre de la famille Vallarta était arrêté. Puis, pour couvrir le premier coup monté, un deuxième, un troisième, un quatrième et un cinquième coup monté ont été mis en scène.
Le journaliste José Reveles dit que le gang du Zodiaque n’existe pas, que c’est une fabrication, un coup monté, et dans son dernier livre « L’affaire Cassez », il documente non seulement, étape par étape, en détails, le coup monté, mais il établit aussi les responsabilités et les motifs.
José Reveles dresse aussi une liste de différents personnages de la vie politique qui ont été injustement incarcérés. A l’heure actuelle, ils sont tous libres, parce que leur innocence a été prouvée. José Reveles affirme que le Mexique est une grande usine de fabrication de coupables, et que la corruption régit le système judiciaire.
La famille Vallarta exige que juges et avocats étudient le dossier, qu’ils suivent la procédure, et qu’ils rendent justice.