Israel Vallarta est l’un des détenus qui, au Mexique, a passé le plus de temps en prison sans avoir été reconnu coupable : quatorze ans sans jugement. Son cas a été médiatisé dès son arrestation, en décembre 2005, lors d’une fausse libération d’otages orchestrée par la police fédérale et retransmise en direct à la télévision. Dans le rôle des kidnappeurs : Israel Vallarta et la Française Florence Cassez. Le couple avait été arrêté sans justification et forcé de participer, un jour plus tard, à un montage conçu pour les incriminer.

A l’époque, la police fédérale, accusée d’accointances avec le cartel de Sinaloa, entendait détourner l’attention des médias. Les ficelles sont grossières, mais dans un pays où les enlèvements horrifient l’opinion publique, le show convainc. Et même si la tromperie est ensuite révélée, une majorité de Mexicains sont persuadés d’avoir bien vu, à la télévision, des kidnappeurs et leurs victimes.

Le cas de Vallarta agglomère tout ce que le système policier et judiciaire contient d’illégalité systématique. Peu d’histoires sont aussi emblématiques des abus commis au nom de cette justice adultérée. Vallarta a été torturé. Il a été envoyé dans une prison de haute sécurité, aux côtés des plus grands criminels. Sa défense a été sabotée par les juges qui se sont refilé son dossier, bourré de témoignages obtenus sous pression policière. Des membres de sa famille ont été arrêtés illégalement, torturés et emprisonnés, alors que Cassez a pu regagner la France après avoir été libérée en 2013.

«Deux poids deux mesures pour Cassez et Vallarta ?» se demande ainsi le journaliste mexicain Julio Hernández López. L’affaire ressurgit ces jours-ci, après l’arrestation, le 10 décembre aux Etats-Unis, de Genaro García Luna, ex-chef de la police fédérale et responsable du montage de 2005. Il est accusé par la justice américaine d’avoir protégé le cartel de Sinaloa lorsqu’il était à la tête de la sécurité nationale.

D’audiences reportées en piétinements de procédure, le cas de Vallarta s’est enlisé dans les rouages d’un système pénal obscur. Présumé innocent jusqu’à ce jour, Israel Vallarta a 49 ans. Il purge une longue peine de prison qui n’a jamais été prononcée.